Nous sommes le 9 juin, Alain nous a quitté il y a moins d’un mois. Il y a des jours comme hier où ça va, d’autres où « I’m a mess ». Aujourd’hui, c’est plutôt un jour sans, je ne parlerai pas d’une nuit blanche mais d’un réveil très matinal. 3h44, nuit terminée. Ce 9 juin, je cumule les étourderies démontrant que je suis là sans vraiment l’être, mon esprit étant ailleurs : le lait déborde dans le micro-onde, je me douche au shampoing, etc. la liste serait bien trop longue à énumérer mais ces anecdotes sont révélatrices de mon état général.
Mais nuit blanche et étourderies ne sont pas le point important de cette journée. J’avais déjà décidé de partir faire le pèlerinage de Shikoku : nous en avions parlé avec Alain peu avant qu’il ne soit sédaté. Et l’on pensait tous les 2 que ce serait une bonne idée pour dépasser son départ et me reconstruire. A l’origine c’était son rêve, il y tenait car il voulait renaitre à lui-même, se découvrir et prendre un nouveau départ après les années de maladie et après avoir pris conscience qu’il devait non pas se taire mais exprimer ses émotions et être présent pour lui avant d’être présent pour les autres.
Aussi, lors de nos échanges à Oncopole, j’avais décidé de le réaliser pour lui, en souvenir de mon amour prochainement disparu et de tout ce qu’il voulait accomplir pour lui-même. Mais je pensais ne le faire qu’à l’automne 2023, soit dans un peu plus d’un an. Après tout il n’y avait aucune urgence et ce n’était pas une priorité. Pourquoi 2023 ? Car je voulais me laisser le temps d’aller mieux, de me préparer physiquement, d’apprendre le japonais pour faciliter les contacts, etc. Bref, je nourrissais une démarche plutôt sensée et très dans l’analytique.
Et ce matin, je me reveille à 3h44 avec une seule idée en tête, une idée qui m’obsède tant que je ne l’ai pas actée comme décidée : il me faut faire le pèlerinage de Shikoku au plus tôt.
Et il ne faut pas attendre l’automne 2023. Le départ sera alors pour octobre 2022 si le Japon a vraiment rouvert ses frontières d’ici là et que la circulation est libre au travers du pays. C’est acté, c’est décidé ! C’est de la folie douce, je ne serai jamais prêt si vite, mais qu’importe, il me faut le faire.
C’est une injonction absolue qui vient du tréfonds de moi-même. Comme si mon âme cette nuit avait pris le dessus et qu’elle avait réussi à faire taire mon mental. C’est elle qui prend les commandes et décidait ce que je devais faire « for a better good ». Tant pis pour la démarche réfléchie, l’organisation, tout ce qui aurait pu me rassurer.
Le départ sera donc pour le mois d’octobre, c’est décidé. Il ne reste qu’à organiser cela et les arrangements nécessaires (sac à dos, chaussures de marche, parcours, etc.) Impossible de tout cadrer comme j’en ai l’habitude en si peu de temps. Ce sera donc l’aventure ! Une première pour moi.